Le but de cette série d'articles est de vous expliquer tous les secrets de la culture des Cactées et autres succulentes. Si vous êtes débutant, prenez connaissance auparavant de notre notice de culture simplifiée pour acquérir les règles de base.
Certains amateurs essayent de faire pousser leurs cactus en recréant très exactement le sol d'origine de l'espèce, ce qui est bien difficile, pour ne pas dire utopique, tandis que d'autres laissent leurs plantes pendant des années dans une banale terre de jardin sans jamais apporter aucune nourriture. De telles méthodes « naturelles » ressemblent plus à du maintien en vie qu'à de la culture. Bien sûr, les plantes élevées «à la dure » survivent, mais ce ne sont pas les meilleures conditions pour obtenir une croissance correcte et une floraison abondante, but avoué de tout cactophile qui se respecte.
La culture en pot n'a rien de naturel : les racines ne peuvent s'étaler, prisonnières d'une paroi plus ou moins étanche, et la vie microbienne et animale y est très réduite. Dans la nature, il n'est pas rare de constater qu'un petit cactus puisse développer des racines traçantes d'un mètre de long, les adultes allant quant à eux, beaucoup plus loin. En occupant le sol à proximité de la surface, les racines permettent ainsi de capter le maximum d'eau de pluie et de sels minéraux nécessaires à la croissance.
Dans un pot, en revanche, le volume de terre à la disposition de la plante est minime. Il est donc logique de l'enrichir pour compenser les prélèvements de la plante, certes relativement faibles par rapport à d'autres plantes, mais bien réels. Il est faux de penser que les cactus n'ont pas besoin d'engrais.
A ce sujet, les fumures organiques ou les engrais organo-minéraux riches en azote donnent des résultats spectaculaires avec certaines espèces gourmandes cultivées en pleine terre, mais peuvent participer au risque de brûlure des espèces fragiles cultivées en pots, ou transmettre des maladies provoquées par des bactéries présentes dans les fumures organiques de mauvaise qualité. L'inconvénient d'apporter beaucoup d'azote aux plantes succulentes est que les tissus se ramollissent et qu'ils perdent beaucoup de résistance aux maladies, aux parasites ou au froid. Les tiges deviennent cassantes, les épines sont chétives, la couleur est très verte.
Les terrains d'origine des Cactées contiennent une très faible proportion de matière organique, donc très peu d'azote. Les sels minéraux disponibles proviennent uniquement de la décomposition des roches (potassium, calcium, magnésium) et de l'apport des pluies orageuses, qui permettent la formation de nitrate d'ammonium en petite quantité. Il est donc préférable de fertiliser nos plantes favorites avec des engrais minéraux, assimilables sans l'aide des bactéries, par exemple avec de l'engrais liquide spécial Cactées, faible en azote, riche en phosphore et surtout en potasse, que l'on apportera deux fois par mois entre avril et août, dans l'eau d'arrosage, et qui favorisera la formation des épines et la future floraison. En début de saison, vous pouvez aussi faire un apport de Séquestrène (chélate de fer) pour faciliter le démarrage et le reverdissement des plantes chlorosées.
Chlorose ferrique sur Cereus.
Couleur jaunâtre et manque de croissance
Une alternative à l'ajout d'engrais liquide, très utilisée par les professionnels, consiste à mélanger à la terre des billes d'engrais à libération contrôlée (dit « Osmocote »). Une seule application peut suffire pour un an, on évite les fastidieux dosages d'engrais, il n'y a pas de traces sur les plantes, ni de risque de carence ou de surdosage, bref... c'est un système pratique et parfaitement éprouvé. Il suffit de le mélanger au substrat de rempotage. Pour un seau de terre (environ 10 L de substrat), comptez 30 g d'Osmocote. Attention ! seul les types d'Osmocote les plus faibles en azote peuvent convenir aux plantes succulentes (par exemple : Osmocote 9-10-18 durée 12/14 mois, Osmocote 11-11-18 durée 8/9 mois).
Les engrais à libération lente comme l'Osmocote ne fonctionnent correctement qu'en incorporation à la terre. Pour des grosses plantes qui restent longtemps dans le même pot ou celles qu'on ne peut pas rempoter, par exemple les compositions en jardinières, il vaut mieux utiliser un engrais de surfaçage en granulés, qui se dissoudront progressivement dans les arrosages. Ce genre d'engrais est connu sous le nom « d'engrais bleu » et son taux NPK est aux alentours de 12-12-17. Un ou deux apports par an sont suffisants, le premier se faisant au démarrage de printemps, le deuxième en fonction des besoins.
S'il est judicieux de nourrir les plantes succulentes, il n'est pas nécessaire non plus d'exagérer dans ce sens. Ne forcez pas les doses ! La croissance optimale n'est pas seulement fonction des quantités de sels minéraux apportés, mais aussi du gaz carbonique capté pendant la nuit, de la luminosité et de la chaleur, toutes choses qu'il est difficile de maîtriser sans installation spécialisée, ni sans habiter dans une région très ensoleillée. D'autre part, le métabolisme CAM dont bénéficient les succulentes est un avantage dans la résistance à la sécheresse, mais un facteur très limitant dans la vitesse de croissance : tous les cactus poussent lentement. Un apport excessif d'engrais sur des Cactées insuffisamment éclairées les transformera au mieux en melons turgescents dénués de toute résistance aux maladies et aux parasites ! Si vous cultivez vos succulentes en tant que plantes d'appartement et que vous ne les sortez jamais, l'apport d'engrais doit être réduit au strict minimum, car aussi lumineux que soit votre intérieur, il ne le sera jamais assez pour garantir un développement harmonieux et sans risque d'étiolement de plantes aussi exigeantes en ensoleillement. Inversement, plus vos plantes sont exposées au soleil et à la chaleur, plus vous pourrez augmenter les apports d'engrais pour stimuler la croissance.